E3 2012, Ubisoft balance par surprise un trailer annonçant une nouvelle franchise : Watch_Dogs. Une certaine effervescence naît autour du titre qui promet d’en mettre plein la vue et d’apporter en sus des nouveautés au genre du GTA-Like. Dans nos salons en 2014, le résultat final est nettement moins probant que les promesses initiales. Le jeu a subi un violent downgrade et son univers est clairement sous-exploité, avec un scénario qui peine à décoller. A la clé, il reste tout de même quelques bonnes idées et un succès commercial bien suffisant pour avoir l’idée de lancer une suite. Watch_Dogs 2 pointe le bout de son nez en cette fin d’année 2016, alors une question se pose : Ubi a-t-il corrigé les défauts de son aîné ?
Cœur de pirate…
Il est bien loin l’ami Aiden Pierce du précédent volet, place à Marcus Holloway, jeune afro-américain en quête de liberté. Marcus est un hackeur de génie et tant qu’à faire, sa démarche féline lui permet en plus de bondir de toit en toit et d’esquiver les obstacles comme personne. Bien décidé à montrer son talent au clavier, il part, la fleur au fusil, pirater le centre Ctos de San Francisco. Et il a bien progressé depuis les événements de Chicago ce Ctos. Version 2.0 oblige, il contrôle de plus en plus d’informations et s’étend géographiquement de manière exponentielle. Mais bon, il n’a pas froid aux yeux notre ami Marcus alors s’en prendre à Big Brother, ça ne lui fait pas peur. Opération réussie en un rien de temps sous fond de tutoriel et voilà que notre pirate informatique est accueilli joyeusement dans sa nouvelle famille, DEDSEC, groupuscule de hackers en mode Robin des Bois. Une belle bande d’énergumènes composée de Sitara, l’artiste du groupe, Horatio, la tête pensante, Josh, le Rain man de l’équipe et Wrench, le foufou de service toujours enclin à lâcher un bon mot derrière son masque de pixels. Le but de l’organisation est simple, faire monter un max le nombre de leurs followers en réussissant des coups d’éclat, ceci afin de faire tomber l’entreprise Blume qui est derrière le Ctos et manipule les foules. Dommage toutefois que le grand méchant de l’histoire soit si peu charismatique, voire un peu ridicule en comparaison de la galerie de personnages que nous propose le soft.
Bienvenue à Hack-atraz
Adieu l’esprit sombre de Watch_Dogs premier du nom, ici, la légèreté prime et l’univers se doit d’être fun et clinquant. Le terrain de jeu, San Francisco, répond à cette logique. La ville est immense, colorée et remplie de personnages et de lieux hauts en couleur. On prendra plaisir à flâner devant certains lieux mythiques de Cisco tels le Golden Bridge ou The Rock. Manette en mains, on se retrouve rapidement devant une version 1.5 de son prédécesseur, on peut hacker aussi bien les gens (pour leur voler de l’argent, écouter leurs conversations, surveiller leurs mails et textos…) que divers éléments dans la ville : grues, feux de circulation, canalisations ne sont qu’une infirme partie des options offertes. On se retrouve en terrain familier si ce n’est que l’on nous donne accès à deux nouveaux gadgets. L’un, nommé Jumper, est un drone roulant, l’autre, qu’il faudra payer à la sueur de vos efforts, s’appelle Quadricoptère et, comme son nom le laisse entendre, il s’agit d’un drone volant. Plutôt sympathique de prime abord, ces deux sidekicks au cœur de carte-mère finissent par rendre les missions un brin trop faciles. Dans une immense majorité des cas, plus besoin pour Marcus de se déplacer, il suffira de rester le cul par terre, PC sur les genoux, et d’envoyer la chair à canon faire le taf.
Parlons-en des missions... Open world et Ubisoft oblige, il y a à boire et à manger au niveau des activités. De manière classique, il faudra compléter les missions principales et secondaires pour faire avancer la trame scénaristique. A côté de ça, des courses sont disponibles un peu partout avec tous types de véhicules incluant même le quadricoptère. Pour les jusqu’au-boutistes de la complétion, la carte regorge d’endroits où faire un selfie souvenir, de points de compétence à débloquer, de lieux d’où lancer des missions de taxi. On peut compter une trentaine d’heures de jeu en ligne droite et y ajouter une vingtaine d’heures supplémentaires pour faire le tour complet : globalement satisfaisant pour un jeu de ce type. Malheureusement, on n’évite pas un fort sentiment de répétition avec des quêtes souvent creuses, des redites de Watch_Dogs 1, des missions un peu fed-ex. Heureusement, après une première moitié quelque peu laborieuse, le jeu offre dans les dernières missions des passages nettement plus intéressants et se permet quelques scènes épiques avec en prime un brin d’originalité.
#Bolosse
Avec tout ça, notre Marcus et sa bande vont avoir du boulot. En pratique, le gameplay repose sur le principe du choix dans l’approche (et non pas dans la date !). Il est par exemple possible de rentrer dans le tas et d’user des gunfights. On notera aussi que les armes manquent cruellement de pêche et que le titre est loin d’être convaincant de ce point de vue. Le manque de difficulté ne pousse par ailleurs jamais vraiment à faire progresser les armes et compétences, il est tout à fait possible de finir le titre sans en fabriquer de nouvelles et en ayant optimisé seulement trois ou quatre skills bien spécifiques. A contrario, on est plutôt encouragé à utiliser nos cellules grises (hacker oblige) afin de passer discrètement entre les mailles du filet. Ici, Watch_Dogs 2 se montre un peu plus convaincant mais ternit son bilan par une IA au ras des pâquerettes. Même hors mission, il n’est pas rare d’être témoin d’errances de la part des PNJ. Méfiez-vous, même garés correctement sur le bord de la route, il est tout à fait possible de se faire rentrer dedans par une voiture de police et que celle-ci allume les gyros, de quoi crier au complot !
Il sera alors grand temps d’appuyer sur l’accélérateur pour fuir ces ripoux. Mais là aussi le bât blesse, WD 2 ferait quasiment passer GTA V pour une simulation automobile. Les véhicules sont de vraies caisses à savon et les motos s’envolent telles des fusées. Sans être franchement gênant pour progresser dans le scénario (qui propose assez peu de courses-poursuites), on est très loin de prendre du plaisir et, quand on pense qu’en plus la carte est grande, on se met presque à redouter les trajets. Pour ce qui est de la technique à proprement parler, ça souffle le chaud et le froid. La modélisation de la ville est chouette, les cut-scenes sont très propres mais il faut se fader un aliasing et un clipping à vous retourner les globes oculaires. Vous pouvez ajouter à cela quelques bugs plus ou moins importants et un frame-rate qui joue les yoyos dès que vous roulez à vive allure. Chose nettement moins flagrante lorsqu’on sort du centre-ville et que le moteur a moins de choses à afficher. Il faut toutefois reconnaître que l’habillage a bénéficié d’un gros boulot et que les artistes d’Ubi s’en sont donnés à cœur joie dans la création, notamment en ce qui concerne les communiqués vidéo de DEDSEC.
Hackers VS Hacker
Clivant, c’est le premier terme qui vient à l’esprit lorsqu’il faut définir l’univers de Watch_Dogs 2. Mettant en scène de manière brillante certaines actualités (les élections, les swatters, la gestion du Big Data), le jeu, en voulant garder le cap de sa légèreté, oublie de donner de l’importance aux événements. On ne fait que survoler le propos, on effleure les sujets sensibles sans jamais vraiment mettre les mains dans le cambouis. Les dialogues nous arrosent de pop-culture, de références geek et d’insultes à base de « yeah mec, on va en faire nos biatch » et passe à côté du parallèle puissant qu’aurait pu nourrir le jeu vis-à-vis de notre société. L’univers dépeint, sorte de Mr ROBOT sous ecstasy, se révèle donc être plutôt le descendant du film Hackers (1995) que du long-métrage Hacker (2015). Après tout, le peu d’attachement que l’on ressent pour ces personnages n’est-il pas finalement le reflet de notre monde connecté, de ses réseaux sociaux et de leurs échanges d’émotions virtuelles ? Toujours est-il que WD2 passe un peu à côté de son sujet pour privilégier le plaisir immédiat. Certains y trouveront leur compte, d’autres pas.
Hack à 47 ?
Le multijoueur aura pris son temps, absent à la sortie du titre, il a été mis en ligne depuis le 22/11/16. Comme pour Watch_Dogs 1, il est directement intégré à l’open-world et vous permet de vous lancer de manière seamless dans l’activité de votre choix. Au programme, coop en ligne, chasseur de prime et victime à pirater. Dans le premier, rien de très original mais ça reste efficace, il ne s’agit ni plus ni moins que de petites missions à jouer à deux. Pour ce qui est de chasseur de prime, vous pouvez jouer en tant que chasseur ou en tant que cible, encore une fois c’est sympathique sans pour autant bouleverser l’ordre des choses. Pour le dernier, victime à pirater, comme pour Watch_Dogs 1, vous débarquez dans la partie d’un autre joueur et devez le plus discrètement possible le suivre le temps de lui pirater ses données. Le matchmaking reste pour l’instant très lent et on est quand même bien loin d’un mode multijoueur à la GTA. Un petit plus donc mais qui restera à réserver aux accros du multi et à celles et ceux ayant retourné le jeu et n’étant pas encore complètement rassasiés.
Point completWatch_Dogs 2 est à l’image de ses personnages, irrévérencieux et maladroit. La licence a beaucoup évolué et a opéré une mue. Son fond et sa forme diviseront sans doute les joueurs. N’en demeure pas moins qu’il tient la route et qu’il semble assumer totalement sa légèreté de ton. Si on peut regretter les soucis techniques et le manque de traitement d’un sujet qui aurait pu amener à tellement plus, en l’état, on se contente d’un moment de fraîcheur passé auprès d’une fantasque troupe de hackeurs, ce qui n’est déjà pas si mal.
On a adoré :
Un univers cohérent
Quelques persos charismatiques
Beaucoup de possibilités
Les nouveaux gadgets
Un level design intéressant
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On n'a pas aimé :
Des soucis techniques
La conduite des véhicules
Répétitif
Un sujet sous-traité
Difficulté quasi inexistante la majorité du temps (mode normal)
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