On le sait, les adaptations vidéoludiques de films ou de séries télévisées font rarement l’unanimité. Difficile de financer l’achat d’une licence à prix d’or et les salaires d’une équipe de développement mondialement reconnue. Difficile également de retranscrire tout l’univers et l’ambiance d’une série tout en voulant garder une part de créativité. Confié à Ubisoft Montréal (à l’origine de Splinter Cell, Prince of Persia, Far Cry ou encore Assassin’s Creed), Lost : Via Domus est-il à la hauteur de la série éponyme ?
Le monde perdu
Succès interplanétaire, Lost est l’une des séries disposant de la plus grande communauté de fans, notamment sur Internet où les théories s’échangent en permanence. Reprendre à l’identique tout le scénario de la série était donc mission impossible. Les développeurs canadiens ont préféré opter pour une histoire parallèle plaçant le joueur dans la peau d’un tout nouveau personnage non vu dans la série mais bel et bien survivant du vol 815. Seul hic, il est amnésique et certains survivants comme Jack ou Sayid ne lui font pas du tout confiance. Rapidement agressé par un mystérieux personnage peu commode, Elliott n’a pas d’autres choix que de retrouver son appareil photo contenant des traces de son passé et plus encore. A l’instar de la série, le jeu se décompose en épisodes d’une trentaine ou quarantaine de minutes débutant par un résumé des épisodes précédents et se terminant par un cliff (renversement de situation générant souvent une attente insoutenable avant le prochain épisode). Via Domus suit en fait la trame de fond de la série, de ses débuts jusqu’à la moitié de la saison 3. Les différents événements phares sont donc bien présents mais vus sous un autre angle. Cependant, avec seulement sept niveaux (épisodes) au programme, la durée de vie du jeu oscille entre 5 et 7 heures pour les fans faisant attention aux moindres détails. Autant dire que résumer la trame principale de la série en si peu de temps s’est fait au prix de nombreux sacrifices. Pour le dire clairement, un joueur n’ayant pas suivi la série d’ABC ne comprendra sans doute rien au jeu, surtout que sa mise en scène sans relief n’est pas une franche invitation à l’aventure. Du coup (et comme on pouvait finalement s’y attendre), Lost Via Domus se destine exclusivement aux fans.
Piège en haute mer
Côté gameplay le soft est en demi-teinte. Concrètement, il utilise des mécanismes de jeu qui fonctionnent mais qui se répètent inlassablement rendant le tout bien mou et répétitif. Là encore, à moins d’être fan, c’est la lassitude qui s’installera. Orienté exploration, le titre fait la part belle aux dialogues avec les différents personnages de la série (Lock, Jack, Sayid, Charlie, Sawyer, Kate, Sun et Mickael notamment), aux énigmes et au troc. Dans le premier cas de figure, les conversations sont dénuées d’émotions et les réponses des survivants à vos questions (à choisir parmi une liste) sont en général très courtes et succinctes. On est donc loin du système de dialogues d’un Mass Effect. Toutefois, il est facile de cerner la personnalité de nos interlocuteurs et on retrouve avec joie des répliques de la série. Hurley et son côté indéniablement cool, Sawyer et son sens des affaires, Lock et sa foi totale en l’île, etc., les fans apprécieront. Le bon côté c’est que la plupart des doubleurs français de la série ont assuré la localisation du titre pour le rendre fidèle à la série, du moins sur ce point là. Cela ne fait cependant pas oublier la synchronisation labiale qui est tout bonnement exécrable.
Il n’existe que deux types d’énigmes qui reviennent inlassablement. Le premier demande de bien placer des fusibles dans des panneaux électriques. En clair une source de 100 volts doit être reliée par différents fusibles à un ou plusieurs points d’arrivée. Mais attention, ces derniers doivent recevoir un nombre bien précis de volts. C’est pourquoi il existe trois types de fusibles, chacun ayant une forme différente et atténuant le voltage de manière bien précise. L’autre type d’énigmes consiste à compléter des suites logiques de nombres ou de lettres pour déverrouiller des programmes d’ordinateurs (les fans comprendront). Enfin, le troc a aussi une part importante dans le jeu. Au fil de votre exploration de l’île vous trouverez différents fruits, différentes boissons et d’autres objets que vous pourrez échanger avec certains personnages contre d’autres items tels qu’un pistolet ou bien encore des torches pour visiter de sombres grottes.
Téléphone maison
Vous devez sûrement penser : c’est bien beau tout ceci mais on veut de l’action ! Il y en a dans Lost Via Domus mais distillée en très petites doses. C’est notamment vers la fin du jeu que certains passages plutôt dynamiques font leur apparition. Il y a par exemple cette stressante partie de cache-cache avec la fameuse fumée noire suivie dans la foulée d’une course-poursuite avec cette dernière. Une ou deux phases de shoot sont aussi présentes mais elles sont malheureusement rudimentaires et imprécises. L’originalité du gameplay vient donc surtout de l’appareil photo de notre personnage, photographe de son métier. Sur l’île, certaines photos permettront de déverrouiller des succès. Dans ses flashbacks, prendre des photos de scènes ou lieux bien précis lui permettra au fur et à mesure de retrouver la mémoire. L’histoire d’Elliott est plutôt bien intégrée à la trame principale et on ne peut que féliciter Ubisoft sur ce point.
Autre point à applaudir : la réalisation. Utilisant le moteur graphique de Ghost Recon Advanced Warfighter 2, Lost Via Domus est visuellement très bon avec une végétation dense et luxuriante, une modélisation des personnages relativement correcte et des effets de lumière de grande qualité. Mention bien également pour la fumée noire bien rendue et vraiment stressante. Les environnements visités sont de plus très fidèles à la série et c’est bien évidemment la force du jeu : nous mettre à la place des acteurs. Si le rythme global du soft n’était pas aussi mou, l’immersion aurait sans doute atteint son plus haut niveau, surtout que la bande-son reprend les thèmes cultes de la série en sus de doublages français et anglais de qualité. Dommage qu’il soit impossible de panacher le tout pour retrouver le combo voix américaines / sous-titres français si cher aux fans de la série. Mais ne boudons pas notre plaisir, le jeu est plaisant à l’œil et à l’oreille.
Point complet
Autant être franc, si vous n’êtes pas fan de la série il n’y a strictement aucune raison d’investir dans Lost Via Domus puisque celui-ci vous semblera bien dur à comprendre (la trame de trois saisons étant résumée en quelques petites heures de jeu) et vraiment ennuyeux. Le titre d’Ubisoft Montréal s’adresse uniquement aux fans de la première heure qui découvriront un titre mou et répétitif mais finalement très fidèle à la série (environnements, scénario, bande-son) et solide graphiquement. On regrettera tout de même une VF totalement désynchronisée avec les lèvres des personnages et une durée de vie vraiment très faible, même pour 45 euros, d’autant plus que la rejouabilité est proche du néant. Si seulement les développeurs avaient proposé un gameplay plus varié et plus dynamique, Lost aurait pu être un immanquable pour les fans. En l’état il demeure un titre sympathique pour une petite soirée sans plus.
On a adoré :
+ Très fidèle à la série
+ Graphiquement solide
+ Bande-son de la série
+ Plus prenant et intéressant sur la fin
+ Découpé en épisodes
+ 45 euros neuf
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On n'a pas aimé :
- Mécanismes de jeu répétitifs
- Rythme global mou
- Impardonnable dans un jeu si court !
- Aucune rejouabilité
- Synchronisation labiale en français
- VO sous-titrée FR absente
- Mise en scène médiocre
- Dialogues limités |