Test - Totally Spies! - Cyber Mission est plein de bonnes intentions mais...
- Par Vincent P.
Passée dans les mains d'Atari, de Minscape ou encore d'Ubisoft, la licence Totally Spies! a été adaptée en jeux vidéo à plusieurs reprises. Néanmoins, le dernier véritable jeu date de 2008 puisque le dernier opus en date, Totally Spies! Mon Agenda Secret sorti en 2009, prenait la forme d'un agenda secret électronique. C'est donc une quinzaine d'années plus tard qu'elle fait son retour, sous l'égide de l'éditeur français Microids qui a décidé de confier le projet à Balio Studio, un studio belge auquel on doit les adaptations de la licence Les Sisters, Les Schtroumpfs – Village Party mais également les adaptations de Fort Boyard (2022) et du Puy du Fou. Ce dernier a pris l'option de développer un véritable jeu d'infiltration pour les plus jeunes. Pari réussi ? C'est ce que nous allons voir dans cette critique réalisée avec un enfant de (quasi) huit ans grâce à un code fourni par l'éditeur.
Le respect du matériau en restant dans le budget
C'est en 2001 que nous avons pu découvrir pour la première fois la série Totally Spies!. Cette production jeunesse est signée Vincent Chalvon-Demersay et David Michel. Elle met en scène Clover, Sam et Alex, trois lycéennes qui sont recrutées par le WOOHP en tant qu'espionnes. Cette organisation secrète de protection de l'humanité est dirigée par Jerry. La petite caractéristique humoristique, c'est que ces jeunes femmes se font « whooper » de manière inattendue par divers stratagèmes, d'un canapé qui se renverse à une plateforme qui se dérobe sous leurs pieds, quand ce n'est pas un conduit qui vient à les aspirer. On retrouve bon nombre de situations loufoques et on apprécie retrouver ces trois lycéennes partagées entre leur vie scolaire et leur vie secrète, le tout ponctué par quelques phases de shopping et de relations sociales.
Très clairement, si vous ne connaissez pas la licence, c'est le moment de vous y intéresser. La série est drôle, bien amenée. Elle s’inspire des Drôles de dames des années 70, tout en y apportant une touche jeunesse bienvenue, en plus d'une certaine modernité. On a même le droit à un peu d'action et à l'utilisation de divers gadgets. Un agent bien équipé, c'est mieux. Entre 2001 et 2007, la série a été bien suivie. Néanmoins, les choses se sont compliquées par la suite, la saison 6 n'étant apparue qu'en 2013. Mais cette pause n'était rien comparée à celle qui suivra. En effet, ce n'est que cette année, en 2024, que la saison 7 a vu le jour, soit onze ans plus tard. Les fans peuvent d'ailleurs se rassurer, la huitième saison est déjà actée. Pour renouveler un peu l'intérêt, cette saison 7 déplace le lieu de l'action. Oubliez Bervely Hills et préparez-vous à découvrir Singapour. L'occasion d'accentuer l'aspect technologique, d'introduire un nouveau méchant, des monstres numériques et plus encore, en passant en prime par un petit relooking de nos héroïnes.
Si nous vous racontons tout cela, c'est parce que ce Totally Spies! - Cyber Mission prend son cadre dans cette dernière saison. Ne soyez donc pas surpris de voir Zerlina, la fille de Jerry, à la tête du WOOHP à la place de son père. Pour le coup, il faut bien reconnaître que Balio Studio a réussi à reproduire l'essence de la licence. Lors des cinématiques 3D, on reconnaît bien les personnages de la série, du moins dans leur version mise à jour, et quelques lieux. Les dialogues sont en accord avec la série et le scénario, bien qu'abracadabrant, s'inscrit parfaitement dans le fil du matériau d'origine. Mieux, les dialogues ne manquent pas d'humour et autres petites anecdotes savoureuses pour les fans. La cerise sur le gâteau, c'est que Microids a réussi à intégrer les voix officielles françaises. Un vrai plus ! Le seul regret, c'est que celles-ci ne sont pas pleinement utilisées. On a le plaisir de les retrouver lors des cinématiques ou pour quelques phrases à certains moments mais les autres dialogues in-game sont purement textuels. On aurait apprécié qu'ils soient également doublés.
Si on peut saluer ce respect au matériau de base, on ne peut nier que l'ensemble a été réalisé avec un budget très bas. Visuellement, le titre accuse plusieurs années de retard. Certes, il essaie de camoufler l'ensemble grâce à une vue en 3D isométrique et un rendu très coloré appréciable mais les modélisations sont sommaires, tout comme bon nombre de textures et d'effets visuels. Ce n'est pas parce que c'est un jeu destiné aux plus jeunes qu'on a le droit de sacrifier autant le soin apporté aux visuels. De même, les animations sont d'un autre temps, avec une rigidité qui saute aux yeux. Côté sonore le constat est tout aussi mitigé. Si quelques pistes musicales sont vraiment très agréables, dont une assez jazzy, d'autres font office de musiques d'ascenseur monotones. Dans tous les cas, leur répétitivité est telle qu'on préfère baisser le volume. On sent que les développeurs ont voulu bien faire avec les outils à leur disposition mais le résultat s'avère tout de même décevant pour un jeu sortant en 2024. C'est d'autant plus vrai qu'on a pu remarquer des bugs assez grossiers, dont un visuel sur la mission 5 qui nous a fait mal aux yeux. C'est sans parler de Clover qui s'est bloquée seule en marchant sur place ou de quelques incohérences. Par exemple, lorsqu'on doit se rendre dans une salle avec chacune des trois espionnes, on doit faire le parcours trois fois sans se faire repérer. Or, à plusieurs reprises, si on a réussi le parcours une première fois et qu'on se fait repérer avec le deuxième personnage, alors les deux personnages qui n'ont pas fait le parcours sont téléportés aux côtés de celui qui a réussi. Autant dire que de se faire repérer nous a permis d'économiser de précieuses minutes...
L'infiltration pour les néophytes
En misant sur l'infiltration pour le gameplay du jeu, les développeurs ont fait un choix audacieux qui est en accord avec ce que l'on pouvait attendre. Bien entendu, il n'est pas question ici d'aller concurrencer les ténors du genre pensés pour des publics plus matures. N'allez donc pas comparer le titre à des Metal Gear Solid, Hitman ou encore Splinter Cell. Ici, c'est l'infiltration pour les néophytes et/ou les jeunes joueuses et joueurs. La première mission qui fait office de tutorial permet de se familiariser avec les éléments de base. Nos espionnes peuvent se déplacer en marchant mais elles font du bruit et sont plus facilement repérables. Une pression sur B et elles passent en position accroupie, gagnant en discrétion. Elles peuvent également ramper dans les conduits mais pas ailleurs. Les ennemis, quant à eux, sont fixes ou mobiles en suivant une routine minimaliste identifiable en quelques secondes. Pour aider à éviter de se faire détecter, les développeurs ont matérialisé le champ de détection desdits ennemis par une sorte de cône de couleur. Si on entre dans ce dernier lorsqu'il est plein, on se fait détecter, arrêter et renvoyer au dernier checkpoint. Si on entre dans ce dernier lorsqu'il est rayé, c'est qu'on est camouflé, du moins en difficulté normale (pas en difficile). Le but reste donc d'éviter de mettre un pied dedans en le contournant ou l'esquivant. Pour cela, il suffit simplement de déplacer son personnage autour ou de se cacher à son passage dans un casier, un buisson, une poubelle ou même un carton.
Rassurez-vous, l'I.A. étant absolument nulle, vous pouvez rester devant elle, tant que vous n'avez pas le pied dans la partie colorée, votre espionne passe inaperçue. Cela vaut également si vous marchez juste à côté d'un ennemi, du moins si vous êtes accroupi. En effet, en restant debout, on fait plus de bruit, ce qui alerte l'ennemi en étant très à proximité en normal, à distance plus convenable en difficile. Mieux vaut donc éviter les flaques d'eau et les bris de verre au sol. Bien entendu, quelques lasers sont également de la partie en plus de quelques interactions avec des éléments du décor pour faire des diversions. Pour le reste, le gameplay se résume à des niveaux un minimum labyrinthiques à parcourir à base d'ouvertures de portes et de mécanismes à enclencher. Certains demandent même de rester accroché au système, le temps de faire passer les coéquipières. Il faut bien l'avouer, même pour un enfant, le résultat est vite redondant, pour ne pas dire lassant. La faute à des missions trop longues d'une demi-heure chacune. Il y en a dix, réparties par deux au sein de cinq chapitres. Pour varier un peu les plaisirs, il y a quelques phases d'exploration, avec des éléments à chercher ou des personnes avec lesquelles discuter, et une poignée de boss qui demandent là encore d'activer des mécanismes en toute discrétion.
Les développeurs ayant fait un certain travail d'adaptation, on retrouve également les gadgets chers à la série. Ceux-ci sont imposés en fonction du personnage et de la situation. Il est néanmoins sympathique d'utiliser la bague TAG-ada pour pister des preuves, le bracelet Bling-bang pour casser des caisses, le rouge à lèvres laser pour découper des portes, les bottes qui annihilent les sons provoqués par un passage dans les flaques ou sur les bris de verre ou encore le gel qui gèle les ennemis en un instant. Quelques améliorations des aptitudes sont même de la partie, à condition de ramasser la monnaie du WOOHP et d'explorer un peu les environnements pour trouver les plans cachés dans les coffres. Si tout va bien, on peut ensuite débloquer les améliorations en début de mission grâce à ce cher Toby. Attention toutefois, pour le distributeur de bonbons qui casse les caméras et pour le gel, les imprécisions liées à la rigidité du gameplay peuvent causer des frustrations, surtout chez les plus jeunes. Il en va de même avec les mines confettis qui immobilisent les ennemis s'ils passent dessus (à des endroits prévus à cet effet uniquement). Bref, c'est sympa de pouvoir utiliser les gadgets mais ça l'est un peu moins de ne pouvoir le faire que quand le jeu le décide et comme il le décide. Il aurait pu être appréciable de laisser plus de liberté aux joueuses et joueurs, voire d'ajouter des mini-jeux divers pour les utiliser et ainsi apporter un poil de diversité. De même, certaines phases d'énigmes/puzzles sont un peu longuettes, comme celles qui demandent de tirer ou pousser des caisses pour créer un nouveau chemin. Même si les développeurs ont essayé de renouveler un poil les situations, on se retrouve à faire les mêmes actions, que les caisses soient visibles ou non (auquel cas il faut les révéler avec un gadget, ce qui rend la phase de jeu plus pénible encore).
Au début de la partie, on choisit qui incarner. Rassurez-vous, en solo, ce choix est inutile puisqu'on se retrouve à incarner les trois à tour de rôle, en switchant simplement avec la gâchette et la sélection du personnage via le menu radial qui s'ouvre (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué). En coopération, en revanche, un personnage est associé à une manette. À trois, c'est vite vu. À deux, chaque manette est associée au personnage sélectionné et le troisième est accessible en fonction de qui assure la permutation. En solo, il faut faire avancer chaque personnage un à un, ce qui implique parfois de refaire trois fois une même zone. Heureusement, d'autre fois, chaque personnage a son chemin, sa porte à ouvrir ou son bouton à enclencher. La coopération est donc de mise, même lorsqu'on joue seul. C'est plutôt bien fait. En coopération, on pourrait penser que chacun incarne un personnage, ce qui permet d'avancer plus rapidement parallèlement, voire d'accroître l'aspect collectif. C'est vrai pour quelques passages, pas pour le reste.
Malheureusement, comme il n'y a pas d'écran scindé, une seule personne est généralement à la manœuvre. Deux cas se présentent. Soit c'est le tour du personnage pour une phase de jeu spécifique, auquel cas les deux autres posent la manette et regardent. Soit c'est juste une personne qui doit jouer parce qu'il faut que Sam actionne un mécanisme pour que Clover actionne le suivant. Alors que Clover pourrait suivre Sam et l'aider (la première peut geler les ennemis et la seconde hacker des éléments), on se retrouve à piloter un drone associé à notre personnage. Ce dernier peut projeter au sol un symbole pour aiguiller le coéquipier (en gros pour dire d'avancer, d'attendre, etc.)... Mais le drone reste dans la même aire de jeu que l'espionne, ce qui fait qu'il ne sert pas à grand-chose en local, les instructions dites à l'oral étant bien plus claires et efficaces. Heureusement, on gagne en dynamisme dans la passage de relais au niveau de l'action et ça évite à la même personne de faire trois fois un chemin mais on pouvait s'attendre à mieux à ce niveau. En revanche, en accélérant sur les passages durant lesquels on peut contrôler les personnages en même temps, on réduit un peu le temps de mission et on augmente la note de fin de mission, tout en explorant un peu plus les niveaux à la recherche de quelques collectibles. Attention toutefois, l'ensemble reste assez court. Votre serviteur et son fils en ont fait le tour en un poil plus de cinq heures, cinématiques et chargements compris.
Point complet
On a adoré : Respect du matériau de base S'inscrit parfaitement dans la Saison 7 Retrouver Sam, Alex et Clover... Ainsi que les voix FR officielles L'humour et les cinématiques De l'infiltration très accessible Quelques gadgets à utiliser Des éléments à collecter en explorant Jouer à 2 ou 3 en coop locale... |
On n'a pas aimé : Mais frustrant de souvent jouer un drone ou d'attendre son tour L'I.A. est catastrophique Missions trop longues Musiques vite redondantes Plusieurs dialogues non doublés Toujours répéter les mêmes actions Animations rigides, gameplay aussi Visuellement, on s'attend à mieux en 2024 Quelques bugs et incohérences gênants |
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31.10.202439,99 €
02/12 -